La Biennale di Venezia : quand l’art contemporain s’affirme à travers l’œil d’un commissaire Africain… / The Venice Biennale through the eyes of an African curator

Rédigé par [L'Arto Team] le Jeudi 12 Novembre 2015 à 21:19

Deux artistes de L’Artocarpe visitent la biennale de Venise afin d’être en phase avec le monde de l’art contemporain. / Two artists from L'Artocarpe went to visit the prestigious biennale so as to be in touch with the contemporary art practices of the world.


Visit of the Biennale, Venice, Italy
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L’Artocarpe est actuellement à Venise, pour la fin de la prestigieuse Biennale d’art contemporain qui fête sa 56ème édition.
Créée en 1895, cette manifestation est la plus respectée des professionnels de l’art qui viennent de loin participer au lancement de chaque édition, au printemps.
C’est ici que sont représentés, depuis 1907, les pays participants, à travers une sélection d’artistes qui ont la lourde responsabilité d’incarner, pour un temps, l’image de leur nation au sein des célèbres pavillons.
Un artiste par pays est généralement retenu, mais le choix d’œuvres de collectifs ou d’une sélection d’artistes est également possible au sein du pavillon national, qui les sponsorise.
Mais le point phare de la manifestation, reste cependant la proposition du commissaire invité, qui présente des artistes de son choix.
 
Cette édition, qui a ouvert ses portes en Mai 2015, s’achève fin Novembre 2015 après six mois de planification.

Voir l’une des villes les plus mystérieuses du monde. Un artiste de L’Artocarpe New York, devant le Pont des Soupirs.
Pour ceux qui n’ont jamais visité Venise, venir à la biennale, est un vrai coup double. Cela offre la joie de circuler dans l’une des villes les plus mystérieuses du monde -construite sur une lagune avec des ponts permettant de passer d’une île à l’autre- en plus de naviguer entre des œuvres d’artistes du monde entier que tout visiteur peut apprécier pour un prix d’entrée raisonnable: 25 euros pour la journée, soit moitié mois cher qu’un tour en gondole.

l'oeuvre de l'artiste Bathélémy Toguo
Mais la raison pour laquelle L’Artocarpe se devait de voir cette édition est tout autre! Cette année, et pour la première fois dans l’histoire de cette importante institution, le commissaire en charge de l’édition est… Okwui Enwezor, un critique d’art et commissaire Nigérian basé aux Etats-Unis. Disons-le brutalement : Mr Enwezor est le premier commissaire noir en charge de la direction de la Biennale di Venezia.
 
Heureux hasard ou simple coïncidence ? La nomination du premier commissaire africain a lieu l’année même où l’UNESCO lance la Décennie Internationale pour les Personnes d’Ascendance Africaine depuis New York. Une forme de discrimination positive imposée au monde occidental, dont l’initiative non avouée, est de transformer singulièrement la couleur des visages des décisionnaires des pays occidentaux durant cette période de sensibilisation intensive, qui durera jusqu’en 2024.
 
On notera également que c’est cette année, que notre petite Guadeloupe a vu le lancement du Mémorial Acte, ce qui aura le mérite de concourir à cette même mission de casser les stéréotypes encore fortement ancrés dans certaines mentalités.
 
L’art contribue également à l’évolution des mentalités.
 
Le commissaire d’exposition du site de L’Arsenal, Okwui Enwezor, a fait le choix de présenter des artistes internationaux, moins connus du grand public, voire même des collectionneurs et des critiques d’art aux côtés d’artistes stars.
 
A l’heure où L’Artocarpe fait le bilan de 6 années de promotion d’art contemporain, le constat est bien là : certains artistes de nos régions sont aujourd’hui prêts pour de ce genre de rendez-vous!
Les membres de L’Artocarpe ont pour la plupart, déjà participé à d’autres biennales bien établies ou moins connues: Sao Paulo ; La Havane ; Dakar ; Les rencontres d’Aruba ainsi que la toute récente Biennale d’art contemporain de Martinique (BIAC), qui annoncerait sa deuxième édition en 2016.
 
Pour y avoir participé au moins trois fois, il est intéressant de noter que la biennale de la Havane n’a rien à envier à celle de Venise. L’Artocarpe a toujours considéré cette biennale caribéenne comme l’équivalente de son aînée italienne.

Visite de la Biennale
C’est pourquoi L’Artocarpe a, des ses débuts, misé sur la qualité de travail de ses membres en les épaulant, en vue de leur permettre d’obtenir une place sur les rendez-vous internationaux. Et c’est chose faite !
Pour cette seule année nous étions à la biennale de la Havane à Cuba pour accompagner un de nos membres qui représentait la Guadeloupe. Pour la deuxième fois consécutive, c’est un membre de L’Artocarpe qui était choisi par le commissaire cubain pour porter haut les couleurs de son île. Ainsi, des membres de L’Artocarpe se sont rendus à Cuba l’aider à monter son œuvre monumentale. Nous avons également participé au colloque des Caribbean Studies Association à New Orleans, autre institution qui célébrait ses 40 ans ; des membres présentaient leur performance à Miami, leur exposition à New York et en Martinique dans des lieux dédiés à l’art contemporain, et nous voici maintenant en visite en Italie!  En 2016, Le Perez Art Museum, invitera L’Artocarpe à Miami, ce qui confirme l’intérêt des instances officielles pour notre structure qui est conseillée au quotidien par sa directrice artistique, Régine Cuzin, commissaire indépendante. Régine Cuzin, à qui l’on doit l’exposition Haïti qui s’est terminée en début d’année, au Grand Palais à Paris, nous oriente sur la voie de la professionnalisation.
 
A l’heure où le Conseil Départemental de Guadeloupe ouvre son Fonds d’Art contemporain à St Claude, on peut considérer que notre Guadeloupe entre de plein pied dans l’art contemporain! Seuls les artistes qui n’y croyaient pas, ou pire, ceux qui en refusaient ce label, il y quelques années encore, peuvent s’en mordre les doigts. Car outre le niveau, c’est tout un arsenal de stratégies qu’il nous faut comprendre dès l’instant qu’on s’engage sur une carrière internationale! Les artistes membres de L’Artocarpe -la plupart basés en Guadeloupe, en Martinique et à Paris, avec des ramifications au Brésil, en Dominique, en Angleterre, en Espagne, à Puerto Rico entre autres- s’y préparent depuis 2009, grâce à des informations régulières qui leur sont données, des résidences au sein d’un réseau solide qui les emporte d’Aruba au Japon[[1]]url:#_ftn1 . Saluons au passage, nos collègues d’autres plateformes comme la galerie T&T ou encore la manifestation d’ARTBEMAO pour ne citer que ces dernières, qui œuvrent également à la promotion de l’art contemporain en Guadeloupe.
 
[[1]]url:#_ftnref1 Une résidence d’artiste est la possibilité pour un artiste de vivre un moment (en général trois mois) dans un lieu à l’étranger, d’y travailler ses œuvres dans un nouvel espace, afin de stimuler sa production artistique.  Les membres de L’Artocarpe sont allés d’Aruba au Japon en passant par la Dominique, le Sénégal, Ténérife et bien d’autres contrées…

Visite de la Biennale
C’est qu’à travers l’art contemporain se déclinent plusieurs espoirs: d’abord celui d’une reconnaissance nationale, même si les artistes de nos latitudes ont compris qu’en s’exportant à l’étranger, ils bénéficiaient de plus de soutien. La récente acquisition par l’un des plus grands collectionneurs du monde, Charles  Saatchi (de la Saatchi & Saatchi gallery à Londres), d’une œuvre de l’artiste Martiniquais Jean-François Boclé, confirme cet état de fait. Boclé, littéralement boudé par son île natale, est pourtant le premier artiste de notre région à se retrouver dans une collection aussi prisée.
L’autre espoir est de se donner la possibilité d’intégrer le marché de l’art (au sein duquel l’art contemporain tient une place primordiale): ce qui semble enfin poindre pour nos collègues de la Caraïbe française, notamment pour cet autre artiste de Martinique, Sébastien Mehal, membre de L’Artocarpe, qui est, cette année, représenté par quatre galeries parisiennes, dont la jeune Maëlle galerie, fondée par Olivia Breleur, une ancienne étudiante de l’école d’art de Martinique. A croire que c’est bien la relève qui nous permettra de participer à cette économie que génère l’art contemporain.
 
Nul doute que certains membres de L’Artocarpe visent la représentation nationale à une future édition de la biennale de Venise !
L’art a cependant cela d’ironie qu’il offre à la Guadeloupe, une certaine indépendance… culturelle. La Biennale de la Havane a innové en considérant à ses deux dernières éditions, la Guadeloupe comme… un pays. Ainsi chaque île de la Caraïbe française était représentée par… elle-même. Ce qui pourrait inciter d’autres biennales à reprendre l’exemple.
La Guadeloupe, aura-t-elle un jour, à l’instar de la Biennale de la Havane, son pavillon à la Biennale de Venise ? Certains y travaillent dans l’ombre…
 
En attendant, cette visite de la Biennale de Venise, est une façon pour L’Artocarpe de faire un compte-rendu critique, qui contribuera à offrir aux membres, une meilleure compréhension du monde dans lequel ils tentent de s’affirmer…
 
 
De Venise, Italie
Joëlle Ferly
Artiste et Fondatrice de L’Artocarpe
artocarpe@gmail.com
 
Pour plus d’informations :
www.artocarpe.net
Facebook : L’Artocarpe
 
 
Photos : vues d’expositions de la Biennale.
 

Visite de la biennale
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Visite de l'exposition - L'Arsenal
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